, L'explication des origines ne peut être que sacrée. Antonio mesure toute la difficulté du sujet et il avoue ne pas être à la hauteur car l'origine des fleuves implique la localisation du paradis 56 . D'emblée, il reconnaît qu'il se perd dans cette question -« me confunde el entendimiento » -et il s'en remet aux propos des hommes savants et avisés

, Le sujet qui touche au sacré impose à l'interlocuteur principal et, partant, à l'auteur, une distance prudente qui, en l'incitant à réfléchir sur la limite du savoir rationnel, suggère, même implicitement, la perspective d'élargissement de ce savoir. La démarche consiste à rappeler la tradition antique et médiévale jusqu'à buter sur l

, Bède le Vénérable) et il est situé en Orient, à une altitude telle qu'il n'a pu être touché par les eaux du déluge. Cette situation, qui favorise l'assimilation du paradis avec le mont Olympe ou avec le mont Athos 57 , entraîne par ailleurs des discussions sur le climat froid et venteux des altitudes 58 . Antonio coupe court à la controverse sur le climat qu'il juge stérile car elle ne s'appuie sur aucun fait avéré, sur aucune expérience. Son intervention, qui peut sembler une échappatoire car elle ne tranche pas la question et finit par rappeler « ce qui est communément admis », impose cependant la nécessité « d'être en accord avec la raison », elle-même fondée sur l'expérience 59 . L'opinion générale est présentée ici comme une posture acceptable tant que rien d'autre ne peut lui être substitué. Tout en se soumettant à cette « commune opinion », Antonio souligne une difficulté insoluble : en admettant que le paradis soit sur la terre, où sont allés Adam et Eve après leur expulsion ?

. Bible, . Du-paradis-en-quatre-fleuves, . Le-tigre, . Euphrate, . Le-ghéon et al., Il suffirait de localiser leurs sources pour connaître le lieu du Paradis 60 . Mais seuls deux fleuves sont connus et identifiés de façon sûre ; pour ce qui est des deux autres

. Ibid, Porque, para tratar lo de los ríos que decís será forzoso declarar primero lo que se puede decir del paraíso terrenal

. Jardín?, , p.103

C. Qu, oppose saint Thomas à une telle localisation et que Luis et Bernardo tentent de réfuter en alléguant l'existence de sommets hors des zones d'intempéries (Ibid, p.104

. Ibid, 104 : «Estas son cosas que se hablan y dicen como por adivinanzas y conjeturas, sin haberse nunca visto ni averiguado; y así cada uno siente y juzga lo que le parece que conforma con la razón

, Les localisations données sont hasardeuses : le Mont Tauro (Caucase) pour l'Euphrate et le Tigre qui s'écoulent en Mésopotamie ; l'Atlas pour le Nil, Ibid, p.111

. Gange, De plus, Luis oppose à cette démonstration l'argument de la dispersion des sources qui invalide la définition du paradis comme source de toutes les eaux et rend impossible sa localisation. Antonio repousse cette contradiction en évoquant les parcours sinueux des cours d'eau : leurs nombreuses résurgences nous en font perdre la trace

G. De-gubbio and . Gabrielli, On voit bien que Torquemada pose les problèmes mais que son plus fidèle représentant, Antonio, s'exprime essentiellement par le biais d'autorités antiques et médiévales qui lui permettent de respecter les dogmes et les croyances. Alors que dans le livre 5 il est convaincu que la terre est ronde, il explique, dans le livre 2, qu'avant le déluge, la terre était plate. Coupant court au débat sur l'emplacement du paradis, Antonio propose de s'en tenir au principe de secret divin formulé par saint Augustin 62 ; néanmoins la raison qui lui fait abandonner la discussion, outre qu'il avoue la limite de ses compétences, interlocuteur discret, utilise a contrario un mode de raisonnement déjà employé dans la discussion sur les monts Riphées, p.61

, Au terme de cette analyse, il apparaît que dans les deux livres pourtant si différents, Torquemada, ne se lance pas éperdument dans les curiosités (mirabilia), comme genre favori des esprits curieux mais non savants

. C'est and I. Torquemada, , p.108

J. .. , 116 : «Pareciéndole a San Agustín que ése era un secreto que Dios quiso que no le supiésemos, sino guardarlo para sí, dice que ninguno puede saber ciertamente adonde está el Paraíso terreno, si no fuese por revelación divina. Y lo mismo pudiera decir de los cuatro ríos que de él salen; y pues ésta es materia que, cuanto más la anduviéramos escudriñando y revolviendo hemos de encontrar mayores dificultades en ella, lo mejor será que la dejemos para otros de mayores letras

, la curiosité participe de l'esprit moderne : «Pocas veces un hombre que sea curioso puede ser juntamente necio, porque son dos cosas que con dificultad se compadecen, vol.63

. Ibid, , vol.2, p.83