La négation : le « côté obscur» de la référence, effets pragmatiques et conséquences grammaticales - Université de Reims Champagne-Ardenne Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2016

La négation : le « côté obscur» de la référence, effets pragmatiques et conséquences grammaticales

Claude Muller
  • Fonction : Auteur
  • PersonId : 956064

Résumé

La négation comme ensemble d'opérations mentales marquées dans l'énoncé Il faut distinguer la négation en tant qu'opération mentale, ou ensemble d'opérations mentales, de ses diverses marques dans les énoncés. Beaucoup de langues, la plupart certainement, ont des marqueurs multiples de négation (français non, ne, pas, nullement, plus marginalement loin de dans Marie est loin d'être laide ou tout sauf dans Il est tout sauf patient) sans parler des mots négatifs (les indéfinis comme rien, personne, la préposition sans, le connecteur ni, des adverbes comme rarement). La variation des formes peut tenir à l'objet nié, les négations de mots ayant des formes intégrées (préfixes en français comme in-, a-, dé-), les négations sans verbe utilisant plutôt non et les négations verbales un marqueur discontinu ne pas. L'opération – ou les opérations mentales – produisant la négation est plus difficile à cerner. Elle met en jeu l'ensemble de ce qu'on peut appeler le « vouloir-dire » du locuteur, ses intentions, sa perception de ce qui est adéquat ou non, attendu ou pas. La négation matérialisée n'a pas le sens ordinaire d'un prédicat, comme cela a souvent été remarqué : « au signe  rien ne répond dans la réalité » (Wittgenstein, 1961 : §4.0621). La négation matérialisée ne se montre pas non plus dans les opérations de tri, lexical, prédicatif, qui forment les perceptions du monde qui nous entoure, même si on peut admettre, comme le dit Spinoza dans une lettre de 1674 : « Determinatio est negatio ». L'énoncé affirmatif produit ne montre pas de trace de ces processus d'auto-assertion qui forment la vision du monde des locuteurs, sauf lorsque l'élucidation du réel est progressive, comme dans : (1) Je ne vois pas bien, c'est un arbre, non, une forme humaine, non, finalement c'est un épouvantail. ou lorsque la négation est utilisée à des fins de classification, comme un marqueur sur un prédicat pour suppléer à une insuffisance lexicale : (2) Les rasés d'un côté, les pas rasés de l'autre ! C'est plus couramment le cas lorsque la négation est lexicalisée dans un morphème comme dans inexact, déboussolé, amoral. Ce sont des formes qui relèvent d'un emploi « descriptif » de la négation (en suivant Ducrot, 1984) : la négation contribue à la construction prédicative, notamment dans les constructions intensives pour lesquelles elle produit un effet d'abaissement qui permet des valeurs intermédiaires : pas mal entre bien et passable, par exemple. La combinaison a du sens, alors que la négation d'un prédicat comme blanc ne donne pas une interprétation allant plus loin que la constatation d'une non blancheur. Il n'est même pas sûr qu'il s'agisse de couleur : l'adjectif « sale » peut justifier la négation de « blanc ».

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hal-01667631 , version 1 (19-12-2017)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01667631 , version 1

Citer

Claude Muller. La négation : le « côté obscur» de la référence, effets pragmatiques et conséquences grammaticales. Res per Nomen V, Négation et référence, Presses de l'Université de Reims, 2016, 9782374960210. ⟨hal-01667631⟩
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