Corps capacitaire et processus d’auto-quantification : vers la construction de savoir-faire perceptif en EPS.
Pour une éducation sensorielle à travers les activités physiques : analyse de pratique et pistes professionnelles
Résumé
Dans le cadre du champ d’apprentissage n°5, l’Education Physique et Sportive accompagne l’élève dans un processus d’apprentissage et de « connaissance de soi » (BO, 2019), par l’utilisation d’outils d’auto-quantification dans différentes activités physique et sportives (Step, course en durée, etc.). Lors de l’activité corporelle du lycéen en step, l’usage d’un tel outil lui permet un accès direct à des mesures de son vivant (Andrieu, 2014) et notamment à sa fréquence cardiaque (données en troisième personne). Ce processus d’auto-objectivation quantitative s’associe à une démarche exploratoire d’écoute de son corps et d’appréhension du vécu de son expérience corporelle (Huet et Gal-Petitfaux, 2011) par ses ressentis. Ainsi, il s’agit « d’éprouver des sensations » (BO, 2019) afin de construire et affiner des savoir-faire perceptifs (Paintendre & al., 2019) à partir de données en première personne (ressentis phénoménologiques).
L’objet de notre étude est d’appréhender comment l’élève holistique (Vanpoulle, 2013) articule in situ ces deux types de données pour apprendre de son corps (Andrieu, 2017) lorsqu’il pratique en step et réguler in fine son projet d’entrainement. En questionnant la lecture incarnée et technologique de soi (Verchère, 2016) du lycéen en phase d’entrainement, nous explorons les mécanismes engagés et la qualité évaluative de son expérience corporelle. La mise en tension de ces deux types de données contribue à identifier dans quelle mesure l’élève appréhende son corps capacitaire (Paintendre & Andrieu, 2015), soit l’écart entre ce qu’il pense être capable de faire par le prisme du vécu et les potentialités réelles du vivant.
Notre méthodologie s’appuie sur le cadre théorique du cours d’action (Theureau, 2006) exploité dans diverses études sur l’activité des élèves (eSaury & al., 2013). Nous nous sommes appuyés sur l’objet théorique du « cours d’expérience » qui exprime l’activité telle qu’elle est vécue par l’acteur « selon un grain très fin, et en particulier (…) ses détails sensoriels et émotionnels » (Theureau, 2010). Les traces de l’observatoire (enregistrements audio-visuels, carnet d’entrainement, observations) permettent de reconstruire le cours d’expérience de l’acteur, par auto-confrontation.
Une hétérogénéité sensible (Paintendre, 2017) des élèves est révélée, soit une capacité disparate pour percevoir, décrire et utiliser son vécu lors de la pratique, tout comme un rapport singulier à l’auto-quantification (incorporation versus support évaluatif). Il est également démontré que l’utilisation croisée de données en troisième et en première personne en step engage autant de progrès du point de vue aérobie qu’une unique utilisation des ressentis.
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